14 janvier 2010

Le lien qui Léa délia...

Avant que ta mémoire ne se perde en des landes
Des landes embrumées, ou tu perdis mon âme
Avant que les frissons ne soient devenus lame
Coupant le fil de vie de toutes tes légendes

As-tu revu, Grand mère, ta main dans ma menotte
L'étoile dans tes yeux, à la mienne pareille
Ta façon de broder, au bord du soir, merveilles
De me montrer l'oiseau à la feuille si haute

Avant d'avoir noyé sous tes rides, mes rires
As-tu rangé, Mamie, mon enfance en ton coeur
Sous les éclairs de moi, comme un oiseau moqueur
Qui revenaient parfois, bribes de souvenirs

As-tu compris avant de fléchir dans tes brumes
Que tu perdais mes rires, et noyais mon enfance
Et que je restais seule à l'orée du silence
Ton absence me manque, et se glisse à ma plume

Avant de n'être plus que ce fragile souffle
Qui, ténu, ne lâcha qu'après longtemps, longtemps
A tu vu la brisure du tout petit enfant
Duquel je naquis femme, dans un tout autre souffle

As tu su tout l'espoir de ce nouveau matin
Fragile fruit en moi, caché sous mes douceurs
Nourri de tant de joies et de tant de douleurs
Qui tissait en secret le fil de mes demains

As tu seulement su que je devenais mère
Quand enfin tu tranchas ce dernier fil de vie
Pour veiller sur l'enfant, en mon corps asservi
Ton sang se tait à l'heure ou le sien se libère.